Rendre les doléances : mais comment ? – 20/03/24
En 2019, au plus fort du mouvement des Gilets jaunes, des millions de Français ont exprimé leurs revendications dans les cahiers de doléances, une initiative née du Grand Débat National. Pourtant, malgré une promesse présidentielle de les rendre accessibles, ces doléances sont restées enfouies dans les archives, suscitant frustration et colère. Aujourd’hui, l’association Rendez les doléances et la députée Marie Pochon s’efforcent de redonner vie à ce qu’ils appellent un « trésor national ».
Rémi Goubert, membre actif de l’association Rendez les doléances, exprime son indignation face à cet oubli : « En 2019, j’étais honoré qu’on donne la voix aux citoyennes et citoyens. Aujourd’hui, j’ai une colère saine de voir que leur parole a été archivée sans être considérée. »
Face à l’inaction gouvernementale, l’association s’est donnée pour mission de récupérer et publier ces doléances. Rémi explique : « Nous appelons les citoyennes et citoyens à aller dans les archives départementales, consulter les cahiers et nous transmettre ce qu’ils trouvent. » Leur site, doté d’une carte interactive, centralise progressivement les informations et les met à disposition du public. Ce qu’aurait dû faire l’Etat au lendemain de cette initiative.
« C’est un exercice qui rentre dans l’histoire de notre pays et ne doit pas en sortir. » Rémi Goubert, Rendez les doléances
À l’Assemblée nationale, la députée Marie Pochon travaille donc à une résolution transpartisane pour exiger la publication des doléances. « Cette restitution fait partie du Grand Débat National. Ne pas honorer cette promesse, c’est mépriser la parole des Françaises et des Français », déclare-t-elle avec conviction.
Des revendications toujours d’actualité
Marie Pochon considère les doléances comme un outil clé pour renforcer la démocratie. Elle propose une plateforme en open source et des événements locaux pour rendre ces doléances accessibles et surtout utiles.
« Nous demandons au gouvernement de tenir sa promesse et de faire un événement de restitution. Cette parole doit être libérée à l’échelle des territoires, pas seulement au niveau national. » Marie Pochon, députée de la Drôme
Les revendications exprimées dans les doléances abordent des sujets toujours d’actualité : le rétablissement de l’ISF, la retraite minimale à 1 200 €, ou encore l’instauration d’un référendum d’initiative citoyenne (RIC). Rémi Goubert souligne l’importance de ces contributions : « Ces cahiers montrent les aspirations de la société. Ils pourraient être utilisés par des associations, des enseignants ou des chercheurs pour mieux comprendre les grands mouvements qui traversent notre pays. »
Cependant, la tâche est titanesque. Comme nous avons pu en faire l’épreuve en allant chercher nous-mêmes dans les archives départementales du 93. Beaucoup de documents restent inaccessibles, faute d’anonymisation ou de stockage incomplet. Même avec toute notre bonne volonté, consulter ces archives est un parcours du combattant.
Les doléances sont là, elles attendent d’être découvertes
Pour Marie Pochon, rouvrir ces doléances représente une opportunité de réconcilier les citoyens avec leurs institutions : « Chiche ! On rouvre ces doléances et on leur donne la place qu’il faut dans le débat public. Cela ferait grandir notre institution et renforcerait la démocratie. »
« Il y a peut-être une volonté politique de ne pas soulever le couvercle. Mais cette restitution est essentielle pour répondre aux attentes des Françaises et des Français. » Marie Pochon, députée de la Drôme
Rendez les doléances et ses alliés parlementaires ont besoin d’un soutien collectif pour que cette initiative aboutisse. Ils rappellent que, malgré les obstacles, « les doléances sont là, elles attendent d’être découvertes. » Entre colère, espoir et persévérance, cette mobilisation illustre un désir profond de redonner sa place à la voix des citoyens dans le débat démocratique.
Et qui sait ? Si on voulait bien les analyser, ces doléances pourraient bien écrire une nouvelle page de l’histoire politique française.
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Réalisation et montage : Elliot Clarke