RIC local, défi national – Le cas de Saint-Alban-Leysse – 11/02/25
Le Référendum d’Initiative Citoyenne, souvent appelé RIC, était l’une des principales revendications du mouvement des Gilets Jaunes en 2019, pour que les citoyennes et citoyens aient plus de contrôle sur les décisions politiques. Un dispositif de démocratie directe encore à légaliser en France.
Le sujet revient depuis régulièrement dans les discussions politiques… En décembre dernier, le député France Insoumise Jean-François Coulomme a déposé une proposition de loi pour inscrire le RIC dans la Constitution. Sans succès à ce jour. Des citoyens tentent de s’emparer du sujet plus localement à Saint-Alban-Leysse près de Chambéry.
Le RIC est un outil de démocratie directe, qui donnerait la possibilité à chaque citoyen ou citoyenne, soutenus par un seuil déterminé d’autres citoyens, de demander l’organisation d’un référendum sur une question qu’ils et elles ont choisi. Pour certains, cet outil pourrait aussi avoir tout son sens à une échelle locale, plus précisément, dans les communes.
Nelly Darbois et Albin Guillaud, qui ont cofondé avec d’autres le parti Solution Démocratique.
En plus de cet engagement pour la reconnaissance nationale du RIC, ils essayent depuis plus d’un an, de mettre en place un RIC dans leur commune en Savoie.
« Vous partez avec votre pétition, vous allez récolter des signatures et si vous réussissez à atteindre un seuil qui est déjà défini dans la loi – mettons, 200, 300 personnes à Saint-Alban -automatiquement, ça gagne l’organisation d’un RIC, une consultation qui est organisée sur le sujet. » Albin Guillaud, Observatoire de la démocratie locale Saint-Albanaise
Une tentative appelée ODLSA pour Observatoire de la démocratie locale Saint-Albanaise, dépendante du bon vouloir du maire en poste : Michel Dyen. Ce dernier ne souhaite pas mettre en place ce dispositif. Ni l’alternative proposée par les défenseurs du RIC : une consultation citoyenne. Un outil juridique, légal pour le coup, qui obligerait à mettre en place une consultation, non-contraignante, en cas de demande signée par 10% des habitants de la ville. Pour le maire, Michel Dyen, il existe suffisamment d’outils de « démocratie directe » dans sa commune comme, par exemple, la concertation avec les habitants en cas de travaux d’urbanisme.
350 expériences informelles en 30 ans
Cet exemple de Saint-Alban-Leysse est symptomatique pour Nelly et Albin. Il montre bien les difficultés à instaurer davantage de démocratie directe « par le bas », directement dans nos communes… Soit parce que la loi ne le permet pas, soit parce que les conseils municipaux se montrent peu enclins à changer leurs pratiques.
« On est dépendant du cadre national. Mais le problème de s’impliquer au niveau national, c’est que pour beaucoup de gens, ça ne parle pas beaucoup. La thématique nationale, c’est trop loin de nous et on avait envie de s’investir localement. » Nelly Darbois, Observatoire de la démocratie locale Saint-Albanaise
Certaines s’y essaient pourtant, de leur plein gré ou accompagnées par des structures comme Fréquence commune dont on vous a parlé récemment. Un rapport de Paul Cébille pour Génération Libre décompte près de 350 expériences de ce type en 30 ans. Une goutte d’eau qui fait de plus en plus boule de neige depuis le mouvement des Gilets Jaunes et la demande grandissante de plus de participation citoyenne.
Corriger les politiques locales, apaiser le débat municipal
Le problème c’est que, quand les communes s’y essaient, elles peuvent être stoppées dans leur élan. « Grenoble avait essayé de mettre en place un système de RIC local relativement ambitieux » nous dit Albin. Une initiative annulée par le tribunal administratif à la demande du Préfet d’Isère. Le dispositif de la mairie de Grenoble a été jugé illégal. « L’assemblée délibérante, le conseil municipal n’ont pas à se voir imposer de décision par quelque moyen que ce soit, y compris un RIC. » se désole ainsi Albin.
Ce qui en ressort, c’est que ce sont des outils très utiles pour corriger les politiques locales et qu’ils font émerger un espace de respiration démocratique au cours d’un (long) mandat de six ans. Ils permettent aussi de résoudre, à l’initiative des habitants, des conflits internes à un conseil municipal divisé.
« L’intérêt principal, c’est ce qu’on appelle les « effets indirects de la démocratie directe ». Juste le fait que l’outil existe, même s’il n’est pas utilisé par les citoyens, ça oblige les représentants, donc le maire et les gens du conseil municipal à encore plus prendre en compte l’avis des citoyens. Ils savent que les citoyens disposent de cet outil qui peut rallonger des process, créer des conflits. » Nelly Darbois, Observatoire de la démocratie locale Saint-Albanaise
Convaincus de l’utilité de ce dispositif, Nelly et Albin continuent de porter le RIC à une échelle nationale, via leur parti Solution Démocratique. On y retrouve d’ailleurs Clara Egger ou Raul Magni-Berton d’Espoir RIC, des figures importantes du combat national pour le RIC Constituant. Un parti qui compte bien candidater aux Municipales de 2026 pour pousser les autres formations politiques à intégrer cette question à leurs programmes.
Le plus simple serait peut-être d’organiser un référendum national sur cette question et/ou de légaliser cet outil de démocratie directe, non ?
–
Réalisation et montage : Raphaëlle Vivent